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Le valet astronomique- un auxiliaire essentiel au paramétrage des horloges à longitudes

Par Dominique Mouret, pendulier-restaurateur, et Ariane Maradan, chercheuse indépendante

Instrument de haute précision battant la seconde, le valet astronomique est l’un des rares mécanismes horlogers pour lequel l’appellation de « garde-temps » prend tout son sens. Grâce aux travaux scientifiques de Ferdinand Berthoud, il a connu plusieurs évolutions et variantes que l’horloger décrit de manière minutieuse dans ses ouvrages, sous les dénominations « pendule », « horloge », « compteur » ou « valet », toujours accompagnées du qualificatif « astronomique ».

 

La mission d’un garde-temps méconnu de nos jours 



Initialement conçu pour effectuer des relevés durant les observations astronomiques dans le cadre de campements mobiles, ce régulateur transportable, placé à proximité de la lunette méridienne, servait également de référence lors du contrôle de la marche des horloges à longitudes avant leur embarquement à bord des vaisseaux et durant chaque escale terrestre.

En conservant jour et nuit le temps vrai, le valet astronomique, indiquant heure, minute et seconde, permettait de mesurer avec une précision extrême la durée des phénomènes astronomiques, tel le passage du soleil ou d’une étoile au méridien. Protégé par un boisseau, son mécanisme, d’une conception simplifiée, mû par un poids et équipé d’un pendule à compensation thermique, n’en demeure pas moins d’une parfaite exécution.

 

Le valet astronomique au sein des écrits de Ferdinand Berthoud



En 1759 déjà, le catalogue qui accompagne la première publication de Berthoud, L’Art de conduire et de régler les Pendules et les Montres, dévoile brièvement un instrument que l’on peut considérer comme le précurseur de ses valets astronomiques : « Une Pendule à secondes pour un Astronome : elle n’a point de sonnerie ; elle va 15 jours sans remonter ; le mouvement est enfermé dans un tambour de cuivre qui a 5 pouces de diamètre, grandeur du cadran. Cette boîte ou tambour tient à une forte plaque de cuivre, qui s’attache contre le mur : il y a des vis de rappel pour mettre la Pendule droite en tous sens. Je rends le transport de cette pièce facile, en démontant la verge du Pendule en trois parties ; de sorte que tout se place dans une caisse d’emballage ou Etui qui n’a que 15 pouces de longueur : Cet Etui sert toutes les fois qu’on veut transporter la Pendule. »[1]

 

Dans son ouvrage De la Mesure du Temps, Ferdinand Berthoud présente différentes horloges astronomiques, parmi lesquelles celle exécutée en 1766 et destinée au Chevalier de Fleurieu, officier de la marine royale et hydrographe.[2] C’est avec son Traité des Horloges marines, publié en 1773, que Berthoud nous offrira la première mention du terme spécifique de « valet astronomique ».[3]


Un exemplaire d’exception conservé dans les collections du L.U.CEUM



Autrefois au service de l’astronome au cœur des observatoires et lors d’expéditions scientifiques, le valet astronomique est apprécié aujourd’hui encore comme instrument horaire de référence, mais également pour son architecture puissante et épurée.

 

Accroché à une suspension à lames ressort et terminé par une imposante lentille plate en laiton, son balancier compensateur « verge à châssis » est composé de tiges d’acier et de laiton placées en alternance pour pallier les effets des écarts thermiques. Dans sa partie centrale est intégré un curseur, que l’on déplace manuellement sur une échelle graduée afin d’optimaliser le réglage « Avance-Retard ».

D’une exécution très soignée et portant sur sa platine arrière la signature « Ferdinand Berthoud A Paris », le mécanisme renferme un train de rouage constitué de trois mobiles et d’une roue d’échappement à chevilles. Mû par un poids, il offre une réserve de marche de 15 jours.



Liste des illustrations

 

1)     Ferdinand Berthoud, valet astronomique avec balancier compensateur « verge à châssis », vers 1795, vue d'ensemble (Collection L.U.CEUM, Fleurier). Dimensions: Hauteur 139 cm, Largeur 25 cm, Profondeur 13 cm.

 

2)     Ferdinand Berthoud, valet astronomique avec balancier compensateur « verge à châssis », vers 1795, vue de la graduation et du curseur sur le balancier.

 

3)     Ferdinand Berthoud, valet astronomique avec balancier compensateur « verge à châssis », vers 1795, vue du cadran.

 

4)     Ferdinand Berthoud, valet astronomique avec balancier compensateur « verge à châssis », vers 1795, vue du mécanisme.

 

5)     Extraite de l’ouvrage de Ferdinand Berthoud, De la Mesure du Temps, ou Supplément au Traité des Horloges marines, Et à l’Essai sur l’horlogerie, publié en 1787, cette planche accompagne la description (pp. 209-210) de l’horloge astronomique construite par Berthoud pour le Chevalier de Fleurieu. Elle témoigne du soin qu’apportait cet homme de sciences à la diffusion de ses travaux.

 


[1] L’Art de conduire et de régler les Pendules et les Montres, Paris, Chez l’Auteur et Michel Lambert, 1759, « Catalogue, Ou Notice des Ouvrages d’Horlogerie que fait & vend M. Ferdinand Berthoud, Horloger à Paris », p. 7, N° 8.


[2] De la Mesure du Temps, ou Supplément au Traité des Horloges marines, Et à l’Essai sur l’horlogerie, Paris, Chez J. G. Mérigot le jeune, Didot Fils et Jombert jeune, 1787, seconde partie, chapitre VII, « Horloge Astronomique, d’une construction fort simple », pp. 209-210 ainsi que planche VIII (cf. illustration 5).



[3] Traité des Horloges marines, Paris, Chez J. B. G. Musier fils, 1773, quatrième partie, chapitre I, « Description du Compteur, ou Valet astronomique », pp. 470-471 ainsi que planche XXVII.