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Les plis cachetés de Ferdinand Berthoud

Rossella Baldi

Le système des plis cachetés de l’Académie des sciences assure aux artisans et aux scientifiques l’antériorité d’une découverte ou d’une invention ; néanmoins, il ne leur accorde pas de droits commerciaux ou financiers comme le ferait un brevet. Ferdinand Berthoud fait usage de ce système à maintes reprises.


La procédure des plis cachetés est introduite à l’Académie des sciences en 1735. Elle permet de déposer, auprès du Secrétaire perpétuel de la compagnie des réflexions, la description d’un procédé ou d’une machine, voire le compte-rendu d’une expérience, sous la forme d’un document scellé et signé par son auteur. Celui-ci a par la suite le droit de le retirer ou d’en exiger l’ouverture. Les plis cachetés sont inscrits et numérotés dans un registre spécial.


Ferdinand Berthoud emploie souvent cette formalité afin de protéger ses découvertes, notamment dans le domaine de la chronométrie de marine. D’autres horlogers de son époque s’en servent aussi. Cependant, Berthoud n’a pas éprouvé le besoin de demander systématiquement la lecture de tous ses documents, qu’il a préféré laisser en quelque sorte méconnus. Il s’agit essentiellement de mémoires dont le contenu a été rendu obsolète par les recherches-mêmes de l’horloger, celui-ci ayant développé avec le temps des machines plus performantes.


Ainsi, deux manuscrits en particulier sont restés fermés jusqu’au XXe siècle : il s’agit du pli cacheté contenant son premier projet d’horloge marine, présenté à l’Académie en 1754, et du paquet déposé en 1764 avec la description de trois autres horloges. Comme on l’a vu précédemment, le document de 1754 atteste des toutes premières études de Berthoud autour de la chronométrie marine.


En revanche, le dépôt du second paquet est plus dicté par les circonstances. Alors qu’en juin 1764 les académiciens rendent leur rapport sur le projet de l’Horloge N° 1 de Berthoud, celui-ci les invite deux mois plus tard à se rendre chez lui pour analyser trois nouvelles horloges qu’il vient de réaliser. Les savants refusant d’examiner les garde-temps dans son atelier, Ferdinand Berthoud envoie leur description au lieu des horloges au Louvre, où siège l’Académie.


Le contenu de ces deux manuscrits n’a été découvert qu’en novembre et décembre 1976. Cette même année, l’Académie des sciences nomme une commission chargée de desceller les très nombreux paquets dont les auteurs n’ont jamais réclamé l’ouverture. Ce même comité, qui existe encore aujourd’hui et qui se réunit deux fois par année, suggère également les noms des rapporteurs appelés à évaluer l’éventuel intérêt scientifique des documents.


L’ouverture du pli cacheté de 1754 (N° 85 dans le registre de l’Académie) a révélé une tentative originale de résoudre le problème de l’impact des oscillations d’un bateau sur le balancier avec un régulateur dont les mouvements auraient été commandés par des boules de plomb. Le pli est composé d’un texte de trois pages et de deux dessins. 


Pour sa part, le pli cacheté de 1764 (N° 105) présente le projet d’une montre marine, résultant d’améliorations techniques apportées par Berthoud à l’horloge et à la montre marines créées par lui auparavant. Sans lésiner sur l’usage de superlatifs pour prouver son génie, il détaille donc une montre avec un échappement à deux balanciers. Le projet était à l’origine accompagné d’un autre pli cacheté contenant les dessins, malheureusement perdus, du mécanisme.


Légendes illustrations


Ferdinand Berthoud, pli cacheté N° 85, 1754, Archives de l’Académie des sciences, Paris

Ferdinand Berthoud, pli cacheté N° 85, dessin à la plume, 1754, Archives de l’Académie des sciences, Paris

Ferdinand Berthoud, pli cacheté N° 105, 1764, Archives de l’Académie des sciences, Paris

Ferdinand Berthoud, pli cacheté N° 105, 1764, Archives de l’Académie des sciences, Paris